• CD

Tout au long de sa carrière, la flûte sera l'instrument-roi, pour ne pas dire le confident d'André Jolivet, comme en témoigne un catalogue abondant. Pour cet enregistrement, Mario Caroli [lire notre entretien paru en février dernier], qui interprète volontiers la musique du compositeur, a choisi de représenter cette production dans ses différents aspects, réalisant un disque d'autant riche. On saluera la clarté, la justesse de vue ainsi que la précieuse documentation du texte que l'artiste lui-même publie en guise de clé d'écoute.

Si le premier mouvement (Fluide) de la Sonate pour flûte et piano impressionne dès l'abord, le second (Grave) s'avère remarquablement inspiré. De même notera-t-on la présence sensible de Silva Costanzo au piano, particulièrement dans le contrasté Violent qui referme dans un échevellement saisissant cette œuvre de 1958.

Cette efficace précision de la pianiste, on la retrouvera dans le Chant de Linos de 1944 dont la virtuosité de Mario Caroli se joue adroitement de la redoutable difficulté technique. Qu'on ne s'y méprenne pas : maîtrise et savoir-faire n'ont jamais nuit à l'engagement, bien au contraire, et c'est bien grâce à ces qualités que notre flûtiste peut se saisir comme il le souhaite d'une œuvre dont il connait les secrets pour – peut-être ?... – la transcender des siens.

Ce bel investissement, tout personnel, et ce travail raffiné de la couleur caractérisent son interprétation des cinq Ascèses pour flûte en sol, l'opus le plus tardif de ce portrait de Jolivet en flûtiste, puisqu'elles furent écrites en 1967. Belle comme un désert, ces lectures, comme celles desCinq Incantations de 1936 inviteront irrésistiblement à la méditation… et révèlent tant de poésie que, sans hésiter, notre rédaction signale d'une Anaclase ! ce CD intitulé Tu surgis de l'absence (titre de la seconde Ascèse, d'après un vers de Max-Pol Fouchet).

BB